dimanche 5 juillet 2015

Le Noeud Gordien, épisode 377 : Déclarations

Édouard avait enfin eu le luxe d’une nuit confortable, mais le répit avait été de courte durée. La sonnette d’entrée le réveilla. Il ouvrit, les yeux plissés, pour découvrir Félicia, un gros café dans chaque main.
Pendant qu’elle entrait, Ozzy se faufila par la porte ouverte. Il se posa sur la tête d'Édouard en croassant. Ce dernier pouvait deviner des reproches dans les craillements de son familier, mais aussi le soulagement de le retrouver. Ozzy devait avoir été désorienté de le sentir disparaître de son radar…
La scène laissa Félicia pour le moins stupéfaite. Édouard prit la corneille sur son poing et fit les présentations de mise avant de lui demander ce qui l’amenait chez lui de si bon matin.
« J’ai parlé à Gordon tout de suite après t’avoir laissé chez toi, hier…
— C’est à croire que tu ne dors jamais!
— Dormir? Jamais de la vie. Je ne pouvais pas arrêter de penser à… tout cela. Les passages d’un Cercle à l’autre. Les menaces du gars dans les tunnels... Celui qui nous a expulsés en claquant des doigts… »
Édouard, lui, avait été trop épuisé pour entretenir une réflexion sur quoi que ce soit. « Un instant! Comment as-tu expliqué tout cela à Gordon? Lui as-tu parlé de… heu, toi et moi?
— Je n’avais pas le choix…
— Tu avais dit qu’il ne fallait pas que ça se sache!
— Ce qui s’est passé dans les tunnels est trop important pour mêler ça à des mensonges…
— Quand même…
— J’aurais préféré garder le secret, mais ce n’était qu’une question de temps : les Maîtres sont bons pour se mêler de ce qui ne les regarde pas… D’ailleurs, Gordon n’a pas semblé très surpris…
— Si Avramopoulos décide de m’en faire baver un coup… »
— Tu vas survivre, j’en suis certaine.
— Alors, j’imagine que ça fait de nous, officiellement… un couple? » Il agrippa les pans de son imperméable pour l’attirer jusqu’à lui. Ils s’embrassèrent tendrement. Il ne l’avait pas approchée durant toute leur escapade en Argentine… Avec la nausée et la mauvaise haleine, il avait préféré garder ses distances.
« Un couple? » Elle sourit. « Oui, j’imagine… » Elle le tira jusqu’à ses lèvres à son tour, les mains posées sur ses fesses. Geneviève ne l’avait jamais tripoté ainsi. Le contact lui plaisait beaucoup. Elle poussa un soupir qui contrastait avec ses yeux pleins d’étoiles. « Ça ferait changement, pour une fois, une affaire qui ne soit pas trop compliquée… »
Pour une fois? Édouard décida de garder ses questions pour un autre jour… Elle était si jolie, elle sentait si bon, sa peau était si douce… Comment avait-il fait pour cesser de l’embrasser, ne serait-ce qu’une minute?
Édouard s’avança à nouveau… Mais Ozzy vint s’interposer entre eux, les ailes battantes. Félicia poussa un petit cri de surprise qui amusa Édouard. « Il est jaloux, on dirait! » Félicia, elle, n’avait pas envie de rire : elle avait la terreur peinte sur le visage. « Ozzy! Ça suffit! »
L’oiseau alla se percher sur le réfrigérateur. Il croassa trois fois, les yeux braqués sur Félicia. Édouard voulut la prendre dans ses bras, mais elle le tint à distance. « Va falloir y aller…
— Aller où?
— Gordon a convoqué tout le monde pour un concile… Une rencontre au sommet. À peu de choses près, on vient de se faire déclarer la guerre… Et j’ai peur de ce que ça implique. »
Édouard fut complètement refroidi à son tour.

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